Retours d’expérience sur l’animation d’un cycle d’ateliers de sensibilisation au numérique au sein d’une collectivité

Si le digital est maintenant omniprésent dans les organisations, la culture numérique et la maîtrise des enjeux qu’il soulève sont loin d’être homogènes parmi les utilisateurs. Les collectivités sont tout autant concernées que le secteur privé, avec une incitation forte à se transformer à la fois de la part de l’Etat et des citoyens.

Comment accompagner et acculturer un public hétérogène autour du SI et de la donnée ? Quels ateliers peuvent être mis en place et avec quels points d’attention et méthodes ?

Pour échanger autour d’un cas concret, nous interviewons dans cet article Violaine autour du cycle d’ateliers qu’elle a piloté, et Séverine qui a conçu et animé l’un de ces ateliers sur le thème « Bien communiquer auprès de ses citoyens à l’heure du numérique ».

Quel était le besoin initial du client ? Pourquoi a-t-il souhaité être accompagné sur ces enjeux de sensibilisation au numérique ?

Violaine :

La DSI de cette communauté de communes recevait de plus en plus de questions et de demandes des utilisateurs, élus comme agents, autour du numérique. Elle avait également identifié des besoins de sensibilisation sur plusieurs sujets, la cybersécurité en particulier. C’était aussi pour elle l’occasion de garder un coup d’avance, avec une démarche de veille, même si de nombreuses initiatives étaient déjà en place.

Dans des communes de taille restreinte, la maturité autour des enjeux du numérique est très variable et implique souvent une sensibilisation et de la conduite au changement, au-delà de simplement des informations descendantes. Une première phase d’acculturation aux enjeux est alors nécessaire.

Le besoin identifié était donc d’éclairer les élus sur les bénéfices et les obligations liés aux enjeux et réalités du numérique et faciliter la compréhension et la montée en compétences des agents. Différentes thématiques étaient envisagées : c’était donc réellement un parcours à concevoir et animer et non des formations séparées.  Suivant les thématiques, le public concerné pouvait aussi bien être des élus, que des agents municipaux au sein des services IT comme métiers. 

Ils étaient ainsi conscients de l’intérêt de se faire accompagner par un partenaire qui disposait des connaissances théoriques, mais également de retours d’expérience terrains et de compétences d’animation et d’ingénierie pédagogique.

Comment avez-vous structuré ce cycle d’ateliers de sensibilisation et pourquoi ?

Violaine : 

C’était bien un package d’ateliers qui était demandé. Nous avons ainsi proposé d’organiser cela avec un animateur présent en fil rouge sur tous les ateliers. Je me suis proposée pour prendre ce rôle de garant du besoin client pendant tout le cycle. Pour chaque atelier, j’étais accompagnée d’un consultant expérimenté sur la thématique concernée.

L’idée était de proposer un parcours jalonné de rencontres mensuelles au croisement des enjeux numériques, sociétaux et environnementaux. Initialement, nous partions avec le client sur un parcours de 6 ateliers sur un an avec des thématiques priorisées par le commanditaire. 

Dans la pratique, nous avons finalement adapté d’atelier en atelier la prochaine thématique en récupérant les attentes à la fin de chaque session. Le premier sujet, la cybersécurité, a été une évidence pour la Communauté de communes.

Le fil rouge entre les différents ateliers permet d’assurer une continuité entre les différents thèmes. Ce ne sont pas simplement une suite de sujets traités séparément ! 

Grâce à cette approche, nous ne redécouvrons pas le contexte d’une fois sur l’autre. Le besoin est mieux compris : le commanditaire n’a pas besoin de répéter les informations et les instructions. C’est aussi une opportunité pour capitaliser les bonnes pratiques, ce qui fonctionne selon le public et bonifier en conséquence les prochains ateliers. Que retient-on de la 1ère séance sur le 2ème ? Comment renforcer le lien avec les participants d’un atelier sur l’autre ? 

En plus de la sensibilisation autour de différents sujets comme la cybersécurité, la communication à l’heure de numérique, la sobriété numérique… c’est aussi l’opportunité de partager entre les différentes communes : par exemple lors de l’atelier « Comment bien communiquer à l’heure du numérique », nous avons débuté en « brise-glace » par un tour de table sur les moyens de communication utilisés actuellement. Ils se sont rendus alors compte que la très grande majorité avait mis en place indépendamment la même application… et qu’ils auraient pu anticiper cela et mutualiser au niveau de la DSI de la communauté de communes !

Le premier atelier portait donc sur l’acculturation autour de la cybersécurité ?

Violaine : 

Fraude au président, phishing, rançongiciel…la cybersécurité est un vrai enjeu pour les collectivités, avec une prise de conscience très variable selon les services et les élus. L’objectif était en premier lieu de les sensibiliser sur la multitude de points d’accès potentiels. 

Pour que cette sensibilisation ait un impact, il faut l’appuyer sur des exemples et des mises en situation qui touchent les personnes présentes. Nous avons illustré avec le cas d’une mairie qui laisse un registre en accès libre aux parents pour l’inscription à la cantine… et qui est pris en photo par une personne malintentionnée pour revendre les adresses e-mails. Nous avons également en amont de l’atelier organisé un test en envoyant un faux e-mail de phishing aux agents pour pouvoir partager les résultats pendant l’atelier. Toutes ces mises en contexte sont très utiles pour sensibiliser l’auditoire !

Pour illustrer, pourriez-vous détailler la préparation et l’animation du second atelier « Comment bien communiquer à l’heure du numérique » ?

Séverine : 

C’est un atelier que nous avons conçu de manière personnalisée, contrairement à l’atelier sur la cybersécurité qui a été adapté à partir d’un socle existant. Reformuler avec le client les hypothèses garantit alors d’avancer de concert.

La première étape est de bien identifier le public qui sera présent afin d’adapter le niveau d’informations et les types d’animation et d’interaction possibles. Dans le cas présent, les participants étaient principalement des élus et des personnes ayant un rôle lié à la communication. 

A partir de ces informations et de recherches autonomes, nous avons travaillé en binôme avec Violaine pour préparer un plan que nous avons présenté au commanditaire. Nous nous sommes alignés ensuite sur les points à approfondir et à faire évoluer aussi bien sur le fond que sur la forme et avons itéré sur une version plus précise du programme. 

Une fois le programme validé, nous avons réalisé le support de présentation et préparé les différentes animations, qui ont été rechallengées avec le client. Il souhaitait par exemple plus s’appuyer sur plus des cas concrets et s’inspirer de ce qui se fait dans des villes de taille similaire. Quels réseaux sociaux sont utilisés ? Quelles innovations sont mises en place ailleurs ? Quelles applications sont déployées avec succès, ou non ?

Dans tous les ateliers, c’est la capacité à se projeter dans des mises en situation, en prenant exemple sur des cas similaires, parlant pour les participants, qui permet de capter l’attention et de réussir la sensibilisation.

Si une partie de l’atelier était en mode descendant, nous avons également intégré des cas pratiques au travers par exemple du travail sur un plan de communication ou des moments d’échanges autour de questions afin de donner la parole. Finalement, sur une durée de 1h30, 1 heure était sur le contenu de l’atelier et 30 min sur des discussions qui maillaient le déroulé et permettaient d’assurer son dynamisme et l’implication du public.

Un point essentiel pour moi, c’est que la partie descendante doit elle aussi être personnalisée par rapport aux attentes du public et à son niveau de connaissance des sujets. Elle doit permettre une appropriation rapide. Typiquement, dans le cadre de cet atelier, proposer une liste d’outils liés à la communication (Canva, Filmora, Eventbrite, MailChimp…) et facilement accessibles pour des communes de petite taille a été très bien perçu. Les participants se projetaient directement dans ce qu’ils pourraient en faire !  Il en est de même pour des partages concrets sur le développement de LinkedIn jusqu’alors peu utilisé dans le secteur public, ou sur des adéquations entre besoins de communication et applications déployées ailleurs.

Bien sûr, au-delà de la pratique et des enjeux opérationnels, l’objectif était aussi de faire prendre du recul sur le « Pourquoi » avant de penser au « Comment ». Nous avons entamé l’atelier avec cet horizon, et avons également abordé des aspects méthodologiques pour bien repartir du but et du public à atteindre, puis en fonction de ceux-ci d’envisager les moyens. On ne met pas en place un panneau digital en cœur de ville sans savoir pourquoi !

De même, finir l’atelier par une partie sur les prochains petits pas permet de se mettre en mouvement, et se poser, ensemble, la question : que faire le lendemain de l’atelier avec ce que j’ai appris ?

Que retenez-vous de ces ateliers ? Quels conseils et bonnes pratiques pouvez-vous partager en termes de préparation et d’animation ?

Violaine : 

Prendre en compte dès le départ le public concerné par les ateliers est essentiel. Il y a déjà l’adaptation par rapport au client. Entre une collectivité et une grande entreprise privée, on n’aborde et on n’anime pas de la même façon ! Les exemples et les mises en contexte varient forcément beaucoup et c’est leur précision et la capacité qu’aura le public à se projeter qui permet d’impliquer et de sensibiliser.

L’atelier doit également être aménagé selon les participants : entre les élus et les différents services, les attentes et le niveau de maîtrise des sujets sont très hétérogènes. Lorsque nous préparons l’atelier, il faut capter les attentes du commanditaire et également des participants. 

De manière très pragmatique, cela se retrouve jusqu’au vocabulaire utilisé. Dans le secteur public, il faut limiter au maximum les anglicismes : parler d’hameçonnage plutôt que de phishing, de maliciel à la place de malware…

Suivant le public et ses attentes, c’est aussi bien la profondeur du contenu, que le vocabulaire ou le niveau d’échanges et d’interactivité qu’il faut dimensionner !

Séverine :

Dans ce cycle, les ateliers étaient 100% en distanciel, ce qui soulève encore plus d’enjeux sur la méthode d’animation et l’interactivité que l’on peut offrir. C’est bien sûr un élément à anticiper dans la conception des ateliers. Si cela complexifie la réalisation, cela ouvre également de nouvelles possibilités pour le client. Chaque atelier est par exemple filmé et ensuite mis à disposition en replay en interne, ce qui permet de consolider la base de connaissances et de faciliter la diffusion et la réutilisation.

Nous avons également bien perçu la différence entre l’adaptation et la conception d’un atelier. Intégrer un ingénieur pédagogique pour la création d’ateliers, comment nous le faisons pour les cycles d’ateliers dans notre catalogue, peut être un vrai plus pour s’assurer de prendre en compte tous les aspects de l’animation et faire vivre une vraie « expérience » aux participants ! Si créer un atelier est plus chronophage, cela garantit aussi de proposer une approche spécifiquement adaptée au public, et d’un point de vue personnel d’être complètement à l’aise pour l’animation comme je ne suis pas une formatrice professionnelle !

Pour les prochains ateliers conçus sur-mesure, nous allons mettre en place une phase de test avec le commanditaire en plus des itérations sur le plan et le support. Cela permettra de bien s’aligner sur l’interactivité et les exercices, en plus du contenu.

Une conviction chez Projexion, c’est qu’animer un atelier va bien au-delà de simplement dérouler un contenu générique sur une thématique. Si la maîtrise du sujet est un must-have, elle est loin de suffire : 90% de la réussite repose sur la capacité à engager l’audience, et donc à l’ajustement de l’atelier selon le public.

Violaine Borde, Consultante en organisation et management de projets

Violaine Borde
Consultante en Organisation et management de projet

Séverine Mondon, Consultante en communication

Séverine Mondon

Consultante en Communication

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