Comment concevoir une structure organisationnelle et un schéma d’organisation qui répondent aux enjeux de l’entreprise ?

Retours d'expérience
Comment définir sa structure organisationnelle ?

Une structure organisationnelle bien pensée permet d’aligner les processus internes, d’optimiser les ressources, et de faciliter la prise de décision, tout en favorisant l’agilité et la réactivité. Cependant, au-delà des schémas et organigrammes, la conception d’une organisation efficace implique aussi de prendre en compte la culture d’entreprise, les dynamiques de gouvernance et les objectifs de performance.

Dans cette interview, Paul, consultant en organisation chez Projexion, partage ses retours d’expérience sur les meilleures pratiques pour définir et mettre en place une nouvelle structure organisationnelle alignée avec les besoins stratégiques de l’entreprise.

Qu’est ce qui définit et constitue une structure organisationnelle ?

Une structure organisationnelle décrit comment les fonctions de l’entreprise sont articulées et interconnectées, et définit la manière dont elles sont pilotées, tant à l’échelle individuelle que globale. Elle présente également la répartition des personnes et des rôles et comment ceux-ci interagissent.

C’est une vision assez statique, alors qu’il y a bien sur des questions d’ordre dynamique dans la vie d’une organisation ! Le schéma organisationnel est ainsi un socle, qui doit être complété par la manière dont celui-ci s’anime : gouvernance, rôles et responsabilités, operating model…

Pour compléter cette définition, la structure organisationnelle va aussi intégrer la philosophie de l’organisation de l’entreprise. Divers modèles organisationnels existent, des plus concentrés et uniformes avec un pouvoir centralisé, à des modèles holarchiques très distribués où l’autonomie et la décision reposent aussi au niveau du terrain et de chaque entité.

Par exemple, dans son modèle des configurations organisationnelles, Henry Mintzberg identifie cinq structures types qui illustrent les différentes façons dont les entreprises peuvent organiser leurs ressources et processus. Ces configurations – structure simple, bureaucratie mécaniste, bureaucratie professionnelle, forme divisionnalisée et adhocratie – permettent de comprendre comment les entreprises structurent leur pouvoir et leurs opérations.

Dans quels contextes et pour quels objectifs revoit-t-on ces structures organisationnelles ? 

Oui, pourquoi changer l’organisation ? J’identifie des motifs réactifs ou proactifs. La première catégorie concerne une organisation qui doit se transformer en réaction à son environnement externe, comme de nouveaux concurrents, ou interne avec par exemple des dysfonctionnements ou une performance qui se dégrade.

La deuxième catégorie de motifs est proactive et se rapporte à une entreprise qui souhaite améliorer son efficacité opérationnelle, ou souhaite se transformer volontairement, pour ne pas subir le marché. Par exemple, dans le cas d’une entreprise rachetée par un fonds d’investissement, l’évolution est souvent menée avec la volonté de gagner encore en performance, sur une organisation déjà fonctionnelle. Adresser un nouveau business model ou une nouvelle activité implique aussi souvent de revoir la structure de l’organisation.

Les situations qui amènent à challenger l’organisation sont très nombreuses !

Quels sont les liens et la hiérarchie entre l’organigramme, le schéma organisationnel et la structure ? 

Le schéma organisationnel correspond à l’organisation conceptuelle posée de manière statique. Il est souvent représenté comme un enchaînement de « boites » avec les liens hiérarchiques et entre les fonctions, afin de modéliser les chaînes de valeur qui traversent l’entreprise ainsi que leurs articulations. L’organigramme est la représentation concrète et plus précise du schéma organisationnel avec les postes et les individus. C’est en quelque sorte une mise en pratique opérationnelle du schéma organisationnel ! Si l’organigramme est utile à chacun pour se projeter, le schéma organisationnel doit être accompagné de l’explication du sens, de l’intention, derrière la structure organisationnelle.

Souvent, les attentes des projets de révision de l’organisation dépassent le périmètre de la structure organisationnelle seule. Le prisme naturel est de se dire « Nous devons revoir notre organisation » ! ». Cependant, revoir l’organisation a de nombreux impacts et la transformation doit aussi intégrer les processus, le modèle managérial, la culture, les compétences et la gouvernance.

Comment cadrer le projet de définition d’une nouvelle structure organisationnelle ?

Avant tout, une vision claire de la situation et du contexte sont nécessaires, et en particulier du « pour quoi » et de la culture de l’entreprise. Bouleverser l’organisation, sans prendre en compte la culture est un vecteur d’échec important.

Afin de concevoir un schéma organisationnel réaliste par rapport à la culture de départ de l’entreprise, nous utilisons des grilles de lecture comme la Spirale des Valeurs Dynamique® de Lionel Barets, qui aide à comprendre la maturité, les modes de relations et les mécanismes de rapport au pouvoir dans les organisations. Les 9 Terreaux Culturels® d’André Robitaille sont également un outil qui permet d’identifier les « pas de transformation » que l’organisation est prête à faire, sans mettre les employés dans une zone d’insécurité trop forte.

La deuxième étape est de cadrer les grands principes directeurs du projet : sens, span of control (ratio minimum manager / managés), cible à atteindre, type de modèle à mettre en œuvre (pyramidal, matriciel, holarchique…), les figures imposées (contraintes inamovibles), la trajectoire des ressources humaines (iso-effectif, volonté de réduction ou dynamique de croissance). Ces principes sont complétés par le niveau de confidentialité ainsi que l’identification des parties prenantes nécessaires pour mener le projet. Cet embarquement dépend bien sûr des contraintes de confidentialité et implique souvent la mise en place de NDA (Non Divulgation Agreement). 

La troisième étape consiste à préciser le cadre opérationnel du projet : le périmètre concerné (toute l’entreprise ? Un périmètre précis ?) le planning prévisionnel, les acteurs internes et externes à solliciter, la gouvernance et les modalités de traitement des désaccords. 

Y-a-t-il une direction de la transformation dans l’entreprise ? De qui s’entourer pour formaliser le projet et mener les ateliers ? Définir ces éléments est un gage de succès !

Une fois le projet cadré, comment concevoir la structure organisationnelle, étape par étape ? 

Il existe plusieurs méthodes, plus ou moins adaptées selon la culture, la taille de l’entreprise et le degré d’évolution visé.

La démarche que j’applique généralement consiste à définir le découpage des grands périmètres concernés avec la direction, et associer un sponsor pour chaque. Ensuite, nous posons les macro-activités pour chaque périmètre et leurs articulations. Le travail est souvent plus aisé pour les fonctions supports que pour les fonctions opérationnelles, les activités de ces premières étant souvent plus ressemblantes d’une organisation à l’autre.

Nous menons ce travail en mode itératif, au travers d’ateliers, afin de reposer les activités et le fonctionnement, en ayant toujours à l’esprit les objectifs de la nouvelle organisation et les principes définis dans le cadrage préliminaire.

Des outils comme le Business Model Canvas sont utiles pour fournir une vue d’ensemble structurée des éléments clés – tels que les activités, les ressources, les partenaires et la proposition de valeur. Utilisée avec un bon sens critique, l’IA générative peut aussi être mise à profit pour aider à sortir des biais et à prendre du recul par rapport à l’existant. Il est en effet parfois difficile de se détacher de l’organisation actuelle, et de se projeter dans des fonctionnements différents.

Si chaque groupe travaille sur un périmètre donné, le comité de pilotage fonctionne également en itératif : chaque groupe y présente son schéma organisationnel au fur et à mesure afin d’ajuster les imbrications des modèles. C’est essentiel pour éviter les chevauchement d’activité et les gaps : la gouvernance et les modalités d’arbitrages prennent alors toute leur importance !

Impossible d’envisager de fusionner les schémas de chaque périmètre uniquement à la fin du projet ! Un principe fondateur des refontes d’organisation est d’éviter justement les silos organisationnels.

Dans ces schémas organisationnels, les équipes vont décrire les grandes fonctions, la valeur à délivrer, le RACI, les compétences requises, les autres périmètres avec qui interagir. Le schéma organisationnel est accompagné de l’explication des choix et de la structure. Il inclut la raison d’être de cette partie de l’organisation, son apport pour l’entreprise et ce qui va guider son action. 

Comment allier les indicateurs de performance avec la conception de l’organisation et le schéma organisationnel ?

Dès les premières étapes où sont posés les grands principes, nous intégrons également les facteurs de réussite et leur déclinaison en indicateurs mesurables. Ils peuvent être très divers selon le contexte : diminution du taux d’absentéisme, fidélisation des personnes clés, gains de part de marché sur tel segment… Le chantier d’organisation peut en effet être lié à des KPI très concrets et métiers. Il ne se résume pas uniquement à des enjeux de culture et de philosophie ! Il intègre quasiment systématiquement une recherche de performance.

Ces indicateurs globaux sont ensuite déclinés par périmètre, avec une approche par les OKR (Objectifs et Résultats Clés) par exemple. Le schéma organisationnel sur chaque partie de l’entreprise peut ainsi indiquer comment il contribue à l’objectif et avec quels indicateurs. Ce sont bien sûr des éléments qui sont discutés lors des COPIL.

Une fois la conception finalisée, comment la déployer, et mesurer afin d’optimiser ?

Avant de déployer, le chemin social peut être un point critique, en particulier quand la transformation impacte l’emploi (tant en nombre de postes, qu’en évolution de leur contenu). Le processus d’information et de consultation du CSE est obligatoire. Les élus doivent être prévenus du projet, et la direction doit leur présenter un dossier de description des principes de la nouvelle organisation et une description au travers des schémas, des organigrammes et des impacts RH (LIEN https://www.projexion.com/metier/conseil-rh/ ) (mobilités, nouvelles compétences à acquérir, nombre et nature des postes avant/après, fiches de postes, dispositifs d’accompagnement des collaborateurs, évaluation des risques psycho-sociaux…).

Le CSE dispose d’un mois de réflexion après l’étape d’information avant de remettre un avis, qui ne sera pas bloquant. Cependant, en cas de défiance par rapport au projet, le CSE peut demander une expertise externe qui entraînera alors un délai supplémentaire. Autant que possible, une bonne collaboration dans le projet avec les partenaires sociaux est nécessaire, et dans tous les cas, cette dimension doit être intégrée.

J’ai vécu des projets où la collaboration entre la direction et le CSE a été très constructive. Certaines remarques ont permis de bonifier la structure organisationnelle.

Le déploiement est bien sûr associé à une démarche d’accompagnement du changement et à une roadmap opérationnelle. Donner du sens et permettre aux collaborateurs de s’approprier la transformation et la nouvelle organisation sont cruciaux. Mettre en place des boucles d’itérations avec les managers permet de sécuriser le déploiement et suivre concrètement sur le terrain la mise en place avec les équipes et l’écart potentiel entre les impacts projetés (process, interactions, rôles…) et la réalité.

Quand les indicateurs de performance ont été anticipés, les responsables du projet peuvent mesurer régulièrement au travers de dashboards l’atteinte ou non des objectifs. Il ne faut pas négliger le laps de temps nécessaire pour intégrer le changement. Il y a toujours une courbe d’apprentissage et souvent une perte en performance sur une période limitée, le temps que l’organisation « apprenne » à fonctionner !

Lorsque des défauts ou des décalages par rapport aux objectifs sont identifiés, nous rentrons alors dans une analyse orientée process pour définir où apporter des correctifs, et lesquels. 

Comment Projexion accompagne ses clients autour des enjeux d’évolution des organisations ? 

Chez Projexion, nous sommes capables d’accompagner un projet de réorganisation depuis les étapes de réflexion très en amont – l’intention organisationnelle- jusqu’à la conception et son déploiement. Nos savoir-faire en gestion de projet et en facilitation d’atelier sont mobilisés pour aider à la réflexion, faire émerger et formaliser efficacement. Nous disposons également d’expertises et de retours d’expérience dans le domaine des audits RH, et de l’accompagnement du chemin social qui facilitent le dialogue avec les instances de représentation du personnel. 

 

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