Sur quels axes repose le déploiement d’une stratégie de gouvernance des données au sein des entreprises ?

Exemple de stratégie de gouvernance des données dans les organisations

Les entreprises ont pris conscience du patrimoine que représente leur capital « données ». Cependant, la mise en place d’une vraie stratégie de gouvernance des données soulève encore de nombreuses questions. 

La gouvernance des données n’est pas un concept théorique ! Sa mise en place en pratique, selon les spécificités et les objectifs de chaque entreprise, est un prérequis pour permettre à l’entreprise de valoriser son capital « données ».

Pour aborder les axes et les rôles clés autour de la gouvernance des données, nous accueillons dans cette interview Quentin, Consultant Architecte et Management de Projets, au sein de Projexion.

Pourrais-tu nous resituer ce qu’on appelle une stratégie de gouvernance des données ? 

La gouvernance de données consiste avant tout à reprendre la main sur ses données, et à mettre en place une stratégie transversale à l’organisation.

Cela implique de comprendre la nature des données, mettre en place des règles, des standards et des indicateurs pour les gouverner ainsi qu’une organisation dédiée avec des responsabilités. La stratégie de gouvernance des données va différer d’une entreprise à une autre : elle doit en effet respecter la culture de l’entreprise, ses objectifs et les attentes des métiers.

La prise en compte par les entreprises de cet enjeu est au croisement de plusieurs facteurs. Tout d’abord, l’augmentation du volume de données collectées par les entreprises. Cette collecte massive, en provenance de multiples supports, complexifie leur utilisation et leur exploitation. Les consommateurs demandent aussi plus de transparence sur les produits, les services… et sur les informations les concernant ! La RGPD a ainsi été un accélérateur des enjeux de gouvernance de données, tout comme l’optimisation de la relation client.

La prise en main par les Directions métiers des enjeux IT et donc des données a participé à cette transformation. Auparavant, le terme « donnée » était associé à l’IT ! Maintenant, le métier doit se réapproprier ses données, en les rendant compréhensibles et en les mettant à son service.

Tout cela nécessite un cadre pour simplifier la gestion, l’analyse et le décisionnel afin que l’entreprise puisse réellement valoriser les données qu’elle consolide. Les enjeux sous-jacents sont nombreux comme la mise en qualité des données, ou l’orientation « data-driven ».

Les retailers sont très consommateurs de données pour analyser les tendances du marché, pour lancer une nouvelle gamme de produit ou pour améliorer l’expérience client. Cependant, calquer son approche sur la stratégie de Google qui est de collecter tous types de données sur sa clientèle impose une maîtrise rigoureuse de leur gestion !

Sur quels axes reposent le déploiement d’une stratégie de gouvernance de la donnée ?

Je vais partager ceux qui me paraissent essentiels d’après mes retours terrains, sans chercher à être exhaustif !

L’élément fondamental de la gouvernance des données, c’est le glossaire métier. La gouvernance des données doit être transversale à l’organisation. Il faut donc partager des définitions les plus communes possibles et ensuite caractériser ce qu’il y a derrière ! Il existe des définitions normalisées comme le proposent certains organismes tels que GS1 pour le retail mais elles ne couvrent pas tout. L’entreprise doit aussi réaliser son propre dictionnaire. C’est un prérequis pour pouvoir ensuite agir sur les leviers de valeur comme la qualité et la conformité.

La qualité des données est bien sûr une composante essentielle. Sans mise en qualité, impossible de faire vivre et d’exploiter ses données ! Ma conviction, c’est que le métier doit définir les règles de qualité, et que l’IT va les appliquer.

Au-delà de la définition, le cycle de vie, la circulation des objets, la manière de gérer la data, doivent aussi être partagés pour limiter les écarts métier/IT. La cartographie du Système d’Information d’un point de vue des données assure d’identifier les liens entre tous les objets, ainsi que leurs mouvements. La visualisation de cette circulation de la donnée ou Data Lineage va ainsi permettre de représenter sa « ligne de vie ». D’où elle vient, où elle va, comment elle va se transformer, comment elle sera consommée et exposée…

Dans l’une de mes missions au sein d’un groupe de retail, un des objectifs était de travailler avec les métiers autour du glossaire et du Data Lineage. Rien que sur l’objet fournisseur, les questions sont nombreuses : Où sont-ils créés ? Quelle(s) application(s) en sont maître et sur quels attributs ? Où vont-ils être exposés ?  Comment sont gérés les accès ? Comment se divisent les différentes informations durant le cycle de vie de l’objet ?

Comment acculturer ses équipes à la Data ?

Quels sont les nouveaux rôles autour de la data au sein des entreprises ?

Les rôles et l’organisation sont au cœur de la gouvernance des données. Il ne faut surtout pas la voir comme une vision purement informatique !

C’est pour cela que les acteurs autour des enjeux data  sont de plus en plus nombreux. Une partie de ces nouveaux rôles existait déjà et on leur a donné un titre officiel : data engineer, data architect… Cependant, certains rôles, en particulier ceux orientés vers le métier, s’inscrivent vraiment dans cette dynamique autour de la gouvernance de la donnée.

Le Data Owner, par exemple, est responsable d’un domaine de données. Il est le garant de la définition de ses données et des processus qui les impactent. C’est presque un juge : il va donner les directives, les priorités, et établir des plans d’actions sur les données pouvant apporter de la valeur métier, comme la mise en qualité ou l’amélioration de la traçabilité sur tels objets.

L’autre rôle central est le Data Steward. Cet acteur va travailler concrètement sur la donnée. Son rôle est très important pour s’assurer que les règles de qualité sont formalisées, cohérentes et suivies, et pour faciliter la compréhension des données par les métiers en définissant une sémantique partagée de tous. Il sensibilise donc aussi l’entreprise autour de la donnée et facilite la réponse aux contraintes de conformité, de sécurité et aux normes !

La participation directe de ces rôles à la stratégie de gouvernance des données ne doit pas masquer que la responsabilité est partagée par toute l’entreprise. Travailler sur la définition des données n’est pas un travail solitaire. Les écarts de points de vue entre services, mais aussi entre entités peuvent être très importants. Collecter ces différentes visions, processus et les aligner nécessite d’impliquer largement. Il est en de même pour accroître la culture data de l’entreprise !

Une erreur courante est de ne pas définir le périmètre d’action. Une gouvernance des données, oui, mais sur quel périmètre ? Avec quels sponsors et quels appuis ? Qui va porter le sujet et les messages pour insuffler l’envie de s’intégrer dans le projet ? 

Nous avons parlé de la mise en place d’une stratégie de gouvernance des données, qu’en est-il de son maintien dans le temps ? 

C’est en effet un aspect qui est parfois négligé ! La gouvernance des données n’apporte de la valeur que si elle est maintenue et mise à jour. Les rôles ne se limitent pas à un instant « T » : toutes les évolutions des processus, des applications ou de l’organisation doivent être menées en lien avec la gouvernance des données.

Les rôles impliqués dans la gouvernance de la donnée ont aussi un regard sur les projets de l’entreprise afin de s’assurer que si de nouvelles données apparaissent, elles soient bien identifiées. Ils doivent aussi communiquer et partager avec tous les services pour les intégrer dans cette démarche. Cela ne se fait pas en un jour, c’est un travail de longue haleine !

Le maintien de la gouvernance des données repose aussi sur la mesure de la donnée pour identifier les axes d’amélioration. Comment savoir sinon si la gouvernance apporte les bénéfices attendus ? Si de nouveaux besoins apparaissent ? Comment redescendre l’information vers les autres équipes ?

Retour d'expérience sur le Data Stewardship

Pourrais-tu nous partager quelques facteurs clés de succès pour mettre en place une gouvernance des données ? 

Vu l’ampleur du chantier, je conseille de commencer sur un périmètre limité. Mieux vaut identifier les domaines prioritaires comme par exemple le référentiel produit, client ou fournisseur pour le secteur du retail. C’est-à-dire là où ce travail sur la donnée apportera des bénéfices tangibles pour tous.

L’évaluation de maturité est un bon point de départ. Pour prioriser les actions sur la data, une bonne pratique est de mener des évaluations de maturité  sur les différents aspects de la data gouvernance comme la présence d’acteurs consacrés à la donnée, la description des données et de leurs expositions ou leur niveau de qualité. Avec ces évaluations, on peut en déduire la maturité data de l’entreprise par domaine, par service, voire par application. Cela permet d’identifier à quel endroit il faut se concentrer pour créer de la valeur. Ces évaluations peuvent d’ailleurs être répétées dans le temps afin d’identifier les progrès et l’avancement par rapport aux projections. 

Ensuite, il faut embarquer le plus de personnes possibles dans la vision. Cela implique un accompagnement au changement, et des vrais enjeux de communication pour faire passer les messages et s’assurer qu’ils soient compris ! Cette communication doit s’inscrire dans le temps. Il faut valoriser chaque victoire et communiquer sur les projets en cours pour créer de l’intérêt. 

Comme dans tout projet de transformation, l’implication des dirigeants est nécessaire. Si l’entreprise ne s’inscrit pas dans une Culture Data, cela ne fonctionnera pas !

Bien sûr, la démarche doit ensuite être outillée, sans contraindre la stratégie par rapport aux choix techniques. Les outils vont supporter l’organisation, et permettre de partager des résultats.

Un de mes retours d’expérience illustre bien l’importance de l’accompagnement. Nous mettions en place une politique de gouvernance des données dans un grand groupe. La première année, les personnes écoutaient les messages, mais ne s’impliquaient pas, car elles ne percevaient pas encore d’intérêts directs. Au fur et à mesure que nous montrions les victoires et que l’organisation s’est installée, la tendance a évolué : au départ, c’étaient toujours nous qui devions chercher le métier pour travailler sur les sujets Data. Puis, petit à petit, cela s’est inversé, le métier est venu de lui-même nous solliciter pour les accompagner autour de la gouvernance des données. Cela a pris du temps, mais la communication et la compréhension des gains ont entraîné un changement de mentalité, et la réussite de cette transformation.

Formation au data management et à la gouvernance des données

Comment Projexion intervient autour de la mise en place d’une stratégie de gouvernance ? 

Nous pouvons accompagner en amont pour définir la stratégie de l’entreprise autour de la data ou préciser le cadre de gouvernance et l’organisation à mettre en place. Nous intervenons aussi sur sa mise en œuvre opérationnelle pour planifier les projets de Data Management ou coordonner les activités « Data ».

Diffuser la culture data dans l’entreprise fait aussi partie de nos missions récurrentes ! L’acculturation à la data peut d’ailleurs être facilitée par des consultants externes qui apportent leurs visions, leurs convictions et leurs retours d’expérience.

Nos consultants peuvent aussi prendre le rôle de Data Architect ou de Data Steward. J’encourage en revanche à conserver le rôle de Data Owner en interne, car il participe à l’appropriation par les équipes. On peut cependant accompagner le Data Owner dans la prise en main de son nouveau rôle.

Chez beaucoup de clients une question récurrente c’est « Par où je commence ? ». Le besoin d’accompagnement et de mise en mouvement autour de la gouvernance de données est réel !

Pour finir, je reviens sur une dernière conviction. La gouvernance des données ne peut pas être un projet isolé. Elle doit avoir un sens pour l’entreprise, les métiers et s’inscrire dans l’ADN de l’organisation. 

 

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