Glossaire métier et dictionnaire de données : pourquoi et comment partager une définition commune des objets dans l’entreprise ?

Dictionnaire et glossaire de données : comment les mettre en place dans mon entreprise ?

Il existe de multiples enjeux autour de la donnée. Cependant, dans la pratique, un premier défi est souvent de partager une même vision des objets métiers et des données. En effet, comment mener des projets autour de la data si les interlocuteurs ne s’accordent même pas sur des définitions communes ?

Quentin et Franck, consultants en architecture chez Projexion, nous partagent dans cette interview leurs expériences et leurs points de vue sur les démarches de glossaire métier et de dictionnaire de données.

Dictionnaire de données et glossaire des objets métiers… est-ce la même chose ?

Quentin : 

Non, et d’un point de vue pratique, c’est important de faire la différence !  Le dictionnaire de données est la vue IT. On y retrouve par exemple la structure des données au sein du SI, comment et où les données sont consommées, les formats utilisés… C’est avant tout un outil technique.

Comme son nom l’indique, le glossaire des objets métiers ou business glossary est lui un outil à destination des directions métiers. Il va proposer une représentation des données associées à des informations utiles pour les activités quotidiennes : définition, sémantique, confidentialité, attributs, comportement, règles, qualité, liens entre objets… avec finalement peu d’informations techniques.

Franck :

Pour illustrer, une question que toutes les entreprises se posent c’est « qu’est-ce qu’un produit ? ». Avant de collecter et exploiter des données, il faut se poser la question du sens métier.

Et cette définition n’est pas évidente, car elle diffère selon les entreprises. Pour un objet « client » par exemple, un prospect est-il un client ? Un client qui a résilié en est-il encore un ? Il existe donc un ensemble de notions métier qui, avant de devenir de la data, doivent avoir un sens. Et ce sens doit être partagé dans l’entreprise ! C’est l’objectif du dictionnaire des objets métiers, qui doit être applicable à toute l’organisation. Un objet métier, c’est quelque chose qui fait sens pour les utilisateurs, et qui permet d’unifier les acteurs autour d’un processus : commande, contrat…

L’objet métier est vivant, il a une naissance et une mort ! Le comportement de l’objet va évoluer suivant l’étape du cycle de vie : l’entreprise ne va pas agir de la même manière vis-à-vis d’un client prospect ou d’un client historique.

Si on caricature, le dictionnaire de données sert à faire communiquer entre elles les applications et le glossaire métier à faire communiquer les services et les individus !

Quentin : 

En effet, les objets métiers sont des éléments provenant des processus métiers. Détailler ses processus métiers est un accélérateur à la définition des données ! Pour conclure, glossaire métier et dictionnaire de données sont complémentaires. Certaines entreprises fusionnent les deux au sein d’un catalogue de données. Si certains métiers arrivent à s’approprier le dictionnaire de données, c’est avant tout le glossaire d’objets métiers qui leur est destiné.

Quand et pourquoi mettre en place un glossaire d’objets métiers ?

Franck :

L’objectif premier c’est de partager un langage commun entre les métiers et l’IT afin de mieux communiquer et s’aligner. C’est la notion d’« Ubiquitous language ». La démarche de glossaire métier est souvent initiée afin de répondre aux enjeux d’incompréhension entre les services.

Le langage des données était historiquement très loin du langage métier. Les informaticiens discutaient de variables et d’intitulés incompréhensibles. Avec le poids pris ces dernières années par les directions métiers dans les projets informatiques, lever les ambiguïtés, faciliter les validations et clarifier globalement les périmètres sont rapidement devenus essentiels.

Quentin : 

Ces enjeux ressortent dès lors qu’il faut mettre en place des processus et aller au-delà d’une définition superficielle. Par exemple, avec le chiffre d’affaires, la définition précise peut différer entre le commerce, les directeurs régionaux, le service comptabilité… comment le chiffre d’affaires du web est-il redistribué sur les magasins ? Quels sont les calculs exacts et les clés de répartition ? Personne n’a tort ou raison ! Chacun a un point de vue différent, mais pas de définition partagée.  Pourtant, la direction a besoin d’avoir une vue précise, homogène et comparable du CA. Sans définition partagée, la donnée devient inutile et inexploitable.

Le glossaire des objets métiers est aussi un élément de réponse face aux réglementations sur les données personnelles : il indique ce qui peut être partagé, à qui, comment…

Il existe des organismes internationaux, comme le ARTS Operational Data Model (ODM), qui proposent des modèles. Dans la réalité, ces modèles sont des sources d’inspiration mais ne sont souvent pas applicables à la lettre dans le contexte particulier de chaque entreprise.

Franck :

Pour compléter, dans certains secteurs, comme la finance, il faut prendre en compte les dimensions légales. C‘est typiquement le cas des factures. Ce sont des bases importantes pour bâtir ton glossaire et ton dictionnaire de données.

Mettre en place un glossaire et un dictionnaire de données va également accélérer les phases de conception et d’intégration des solutions. C’est un impératif dans les contextes internationaux où l’entreprise doit échanger des données en France, en Russie, en Italie… de même pour les échanges avec son écosystème. Pour conclure, le glossaire apporte donc une vision partagée, participe à l’amélioration de la qualité des données et est un socle pour tous les projets IT et les processus métiers.

Avez-vous des retours d’expérience sur les éléments déclencheurs des démarches de glossaire et de dictionnaire de données ?

Quentin : 

J’ai l’exemple au sein d’un groupe de grande distribution où c’est la qualité de la donnée qui est à la source du projet. Les incohérences dans les informations impactaient leur image de marque auprès des clients et posaient des soucis dans les échanges avec les fournisseurs.

Le déclencheur peut aussi venir de la direction lorsqu’elle se rend compte que c’est un impératif pour pouvoir prendre des décisions pertinentes basées sur ses données ! Les entreprises qui se disent orientées « Data-Driven » ne peuvent pas se permettre des approximations.

Un autre déclencheur, c’est la perte de productivité. Le cas courant, c’est un chef de projet qui doit appliquer des changements sur une application et cherche à cadrer leurs impacts sur les données. Il se retrouve à multiplier les réunions avec des acteurs plus ou moins au courant et à faire des hypothèses avec tous les risques que cela implique, car aucune traçabilité et référent n’ont été identifiés sur les objets métiers !

Franck :

Les GAFA sont tellement concentrés sur la collecte et la compréhension des données qu’ils ont aussi forcé la main à certains acteurs. Pour pouvoir vendre certains produits, par exemple d’Apple, les exigences de qualité et de structuration des données sont élevées. Pour se faire référencer sur Amazon, il faut aussi présenter une donnée juste, à jour.

Comment se mettre en mouvement sur ce sujet ? Le dictionnaire de données vient-il dans un 2èmetemps, après avoir défini le glossaire métier ?

Quentin : 

Dans un monde parfait, oui. Souvent, il existe déjà des données, des applications, des bases de données… et donc au moins des prémices d’un dictionnaire de données. La démarche peut donc être itérative et le glossaire métier peut s’inspirer de l’existant.

Ce sont dans tous les cas des projets qui ont besoin d’avoir un sponsor. Si c’est la DSI qui initie la démarche, les métiers doivent être impliqués dès le lancementLa première étape est de faire un état des lieux de ce qui existe déjà dans l’entreprise. On trouve parfois des semblants de dictionnaires de données ou de glossaires métiers éparpillés. Ensuite, il faut prioriser les sujets pour s’assurer d’embarquer les équipes et être aligné avec la stratégie de l’entreprise.

 Dès le départ, il faut faire passer le message que la donnée ce n’est pas que du digital ou de l’IT, c’est aussi une vision métier !

Franck :

Dans de nombreux cas, ce sont les projets de l’entreprise qui vont te guider. Les objets métiers vont être découverts et priorisés lors du travail sur les processus. Pour un projet supply chain, l’alignement sur le produit va être rapidement un prérequis, de même avec le client pour un projet de GRC.

Comme l’objet métier sert la volonté de transformation, le travail doit être mené dès le début du projet. C’est un systématisme à mettre en place dans les méthodes de l’entreprise. L’objet métier va structurer l’organisation, les applications, les processus et les développements.

Quels conseils pratiques donneriez-vous pour mettre en place un glossaire métier ou un catalogue de données ?

Quentin : 

Identifier les bons acteurs ! Comme toute démarche d’alignement, la gouvernance et les règles sont des points d’attention à anticiper. Quel est le périmètre d’actions ? Qui est le référent pour tel objet ? Qui sont les contributeurs ? Souvent, les échecs sont dus à une mauvaise identification des parties prenantes ou un projet porté uniquement par l’IT dans lequel le métier ne s’implique pas. On aboutit à un dictionnaire de données… pas à un glossaire métier !

Il faut aussi s’adapter à la maturité de l’organisation vis-à-vis de la data. Mieux vaut commencer par des choses simples, étape par étape. Débuter par un fichier Excel pour créer le dictionnaire métier n’est pas une aberration si cela facilite la démarche. Bien sûr, cela atteint rapidement ses limites et il faut ensuite s’équiper d’outils plus user friendly et qui assurent un accès facile à l’information.

Franck :

Par la suite, comme tout outil d’entreprise, il faut l’administrer, avoir un support, des processus pour le gérer et surtout assurer sa mise à jour ! Cela implique aussi une communication continue. À tout moment, toute l’entreprise doit savoir où aller chercher l’information et être certaine de sa qualité et son actualité. Il faut toujours avoir un responsable par objet, garant de la définition et de son maintien pour toute l’entreprise, et non sur un périmètre d’activité spécifique.

Avoir un propriétaire bien identifié pour chaque objet métier est un vrai facilitateur dans les projets ! 

Comment Projexion accompagne-t-il les entreprises autour de ces enjeux de glossaire métier et de dictionnaire de données ?

Quentin : 

Nous adaptons nos interventions selon la maturité, la stratégie et la taille de l’organisation. Nous pouvons débuter par des prestations d’audit afin d’établir un état des lieux, les priorités et le plan d’actions. Nous assistons aussi des clients sur la sélection et la mise en place de l’outillage, ou autour de rôles précis comme les data stewards. Au sein de grands groupes, nous pouvons accompagner sur un périmètre plus large : modélisation de la donnée, animation des équipes pour définir le glossaire et le dictionnaire de données, stratégie de gouvernance

Nos expériences nous permettent de partager des principes et des méthodes confrontés au terrain. Nous nous imprégnons ainsi rapidement du contexte et de la culture d’entreprise afin de proposer des modèles de données et d’objets à partager et à enrichir en collaboration.

Franck :

Autour des les enjeux de gouvernance de la donnée, nous menons des missions pour calibrer et mettre en place des plans d’actions en fonction de l’environnement de l’entreprise. Pour une PME avec une faible maturité sur la donnée, nous pouvons initier les premiers pas de la démarche et l’aider à cadrer les prochaines étapes. Nous dispensons aussi des formations autour de la data, dont un module de formation sur le Dictionnaire et la modélisation de données.  Le dispositif doit dans tous les cas s’adapter à chaque situation !

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